Homélie pour l’ouverture du Triduum, P. Tomaž Mavrič, CM

Les missions vincentiennes : prophètes et synodaux dans l'annonce et la charité pour continuer la mission du Christ. Homélie du P. Tomaž Mavrič, CM à la chapelle de la Médaille Miraculeuse (Paris) lors du triduum pour la célébration du 4ᵉ centenaire de la Congrégation de la Mission.

Nous sommes ici aujourd’hui pour rendre grâce à Dieu – c’est le sens même de l’Eucharistie – pour les innombrables bénédictions et grâces accordées à la « Petite Compagnie » depuis sa fondation jusqu’à aujourd’hui. Bien que la fondation de notre Congrégation ait eu lieu il y a 400 ans dans la maison des de Gondis le 17 avril 1625, l’inspiration de notre Congrégation, ainsi que celle de l’Association Internationale des Charités et des Filles de la Charité, date de 1617, l’année du Charisme. Cette inspiration s’est déroulée en deux temps : Folleville en janvier et Châtillon en août.

Comme nous le savons tous, Vincent a prêché le premier « Sermon de la Mission » le 25 janvier 1617 dans l’église paroissiale de Folleville. Quelques jours auparavant, il avait entendu la confession d’un paysan mourant à Gannes, qui déclara plus tard qu’il aurait été damné sans elle. Effrayée par cet aveu, et réalisant que d’autres personnes de ses domaines pourraient être dans la même situation, Madame de Gondi s’interroge : « Ah, M. Vincent ! Que d’âmes perdues ! Comment y remédier ? » Ou, en d’autres termes, « Que faut-il faire ? », ce qui est devenu la question vincentienne. Elle a exhorté Vincent à prêcher sur la nécessité d’une confession générale. Comme Vincent l’a expliqué, « Dieu a eu une telle considération pour la confiance et la bonne foi de cette dame … qu’il a béni ce que j’ai dit ; et ces bonnes personnes ont été tellement touchées par Dieu qu’elles sont toutes venues faire leur confession générale ». Ainsi, Vincent a pris conscience de la pauvreté spirituelle des habitants de la campagne. Il a pris des mesures pour la soulager en rassemblant quelques bons prêtres qui se sont joints à lui pour catéchiser les pauvres des zones rurales, ce qui a finalement conduit à notre fondation.

Au mois d’août de la même année, il est curé à Châtillon-les-Dombes où, un dimanche matin, alors qu’il prépare la messe, on lui parle d’une famille en situation de grande pauvreté à la périphérie du village. Tout le monde est malade, sans personne pour les aider. Touché par leur situation, il a recommandé cette famille à ses paroissiens pendant le sermon. Là encore, comme Vincent l’a expliqué aux Filles de la Charité, « Dieu, touchant le cœur de ceux qui m’entendaient, les a émus de compassion pour ces pauvres gens affligés ». Il a ainsi pris conscience de la pauvreté matérielle des habitants des villages ruraux. Lorsque, plus tard dans l’après-midi, il a été témoin de presque une procession de fidèles allant ou revenant de la maison de cette famille, il s’est rendu compte que leur générosité était trop grande en une seule fois et qu’il fallait l’organiser. C’est ainsi que furent fondées les Confréries de la Charité, que nous connaissons aujourd’hui sous le nom d’AIC : l’Association Internationale des Charités.

Certaines de ces Dames, en particulier à Paris, n’étaient pas en mesure de rendre les humbles services aux malades pauvres, mais des jeunes femmes de la campagne se présentèrent pour le faire. Elles finirent par se réunir chez Louise de Marillac pour une formation qui aboutit à la fondation des Filles de la Charité. Ainsi, entre 1617 et 1633, en l’espace de 16 ans, les trois fondations de Vincent en faveur des pauvres ont vu le jour. Il avait reconnu la vérité de ce qu’un de ses confrères exprimait fréquemment, « … les pauvres gens du peuple sont affamés de la parole de Dieu et on les laisse mourir de faim, faute d’assistance ».
Vous remarquerez que chacune des fondations de Vincent a impliqué des laïcs. Il n’a jamais travaillé seul. Il a toujours compté sur la collaboration des autres. Toutes ses fondations sont nées et se sont nourries de la prière et de l’action, perçues à travers l’écoute attentive et l’étude de l’Évangile, ainsi que par le discernement et l’obéissance à la « Volonté de Dieu », dans la célébration des sacrements de l’Eucharistie et de la réconciliation, dans la reconnaissance de la réalité des pauvres, et dans le cheminement avec les laïcs, qui l’ont aidé à prendre conscience de l’appel du Seigneur.

Réfléchissons maintenant brièvement à la manière dont cette histoire s’inscrit dans le contexte de notre liturgie d’aujourd’hui. Dans la première lecture, tirée des Actes des Apôtres, nous apprenons que « la communauté des croyants était unie de cœur et d’esprit » et qu’« il n’y avait pas d’indigent parmi eux », parce que tous donnaient librement leurs biens pour qu’ils soient « distribués à chacun selon ses besoins ». N’est-ce pas ce que nous sommes appelés à faire : donner librement de nous-mêmes – de notre temps, de nos talents et de nos trésors – pour soulager les pauvres ? Nous poursuivons ainsi la mission du Christ sur terre en apportant une aide à la fois spirituelle et matérielle à ceux qui sont dans le besoin. Le psaume responsorial déclare quelle est notre récompense : « Heureux ceux qui prennent soin des pauvres.

L’Évangile nous présente les deux grands commandements : l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Ils constituent le fondement de toute action caritative. Nous ne pourrions pas accomplir notre mission d’évangélisation et de service sans l’amour de Dieu et de tout le peuple de Dieu.

A Folleville et à Châtillon, les réponses de Vincent aux situations ont été à la fois prophétiques et synodales. Il a reconnu ce que Dieu lui demandait et a impliqué d’autres personnes dans les actions qui ont suivi. Nous aussi, nous devons réfléchir à ce que Dieu nous demande et le mettre en œuvre. Nous sommes également appelés à être des prophètes dans ce monde et à travailler en synodalité avec d’autres. Nous devons mettre en pratique les paroles de Jésus à un spécialiste de la loi : « Va et fais de même » (Luc 10:37).

Je laisse les dernières paroles à notre saint Fondateur lui-même :

Ô mon Sauveur, Tu as attendu seize cents ans pour te créer une Compagnie qui professe expressément qu’elle poursuivra la mission que Ton Père T’a envoyé accomplir sur la terre, et qui utilise les mêmes moyens que Toi, en faisant profession d’observer la pauvreté, la chasteté et l’obéissance. Ô mon Sauveur, je ne t’ai jamais remercié pour cela ; je le fais maintenant pour tous ceux qui sont présents et absents. Dans tes desseins éternels, tu nous as destinés à ce ministère ; accorde-nous de l’accomplir par ta sainte grâce ! Mais, ô Sauveur de nos âmes, regarde ceux que tu utilises pour la conversion des hommes et la poursuite de ta mission : des pauvres comme nous ! Quel sujet d’embarras pour nous ! Seigneur, accorde-nous la grâce de nous rendre dignes de ce ministère et de notre vocation.

Tomaž Mavrič, CM
Supérieur général

 

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28 aprile 2025 Messa da Rue du Bac Presiede il Superiore Generale

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